Selon une étude, les cellules tumorales parasitent sur d’autres cellules pour survivre

Par Hélène Proux

Les cellules tumorales dépourvues d’une protéine essentielle pénètrent dans les cellules voisines pour en extraire les nutriments, puis quittent ces hôtes sous forme de cellules intactes, peut-être prêtes à former des métastases, selon une étude.

Les cellules tumorales ont la capacité de parasiter pour prolonger leur vie

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Selon un rapport publié le 29 mars dans « Frontiers in Cell and Developmental Biology », certaines cellules d’une tumeur se nourrissent d’autres cellules pour survivre et éventuellement pour former des métastases. Les auteurs expliquent que cela se produit lorsqu’un complexe protéique de réparation de l’ADN est désactivé dans les cellules cancéreuses. Cette déficience tue les cellules à moins qu’elles n’envahissent les cellules tumorales voisines et ne rassemblent du matériel cytoplasmique. Les scientifiques indiquent qu’il s’agit de la première preuve, à leur connaissance, que les cellules tumorales peuvent devenir parasites en l’absence d’un gène critique.

« Malgré ces résultats intéressants et stimulants, l’étude reste une preuve de concept. D’autres expériences sont nécessaires pour vérifier cette découverte », écrit Jawad Fares, chercheur en neuro-oncologie à la Northwestern Feinberg School of Medicine, dans un courriel adressé à « The Scientist ».

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Okay Saydam et Nurten Saydam, biologistes moléculaires à l’université du Minnesota, ont cherché à savoir comment les cellules cancéreuses s’adaptent à la perte du complexe protéique Ku, qui aide l’ADN à se réparer et qui est essentiel à la survie des cellules. Les chercheurs ont utilisé une lignée de cellules tumorales colorectales modifiées pour présenter cette déficience. Ils ont progressivement éliminé la protéine Ku70, ce qui a entraîné un appauvrissement des deux parties du complexe Ku, Ku70 et Ku86. Ils ont ensuite étudié au microscope le mouvement de ces cellules cancéreuses déficientes en Ku et ont comparé leur activité à celle des cellules cancéreuses parentales dont la protéine Ku était intacte.

Après 10 jours sans le complexe Ku, environ 80 % des cellules tumorales étaient mortes. Celles qui ont survécu sont devenues plus grandes et ont généré des membranes remarquablement allongées. Certaines cellules déficientes en Ku se sont retrouvées entièrement dans des cellules cancéreuses colorectales adjacentes également dépourvues de Ku, bien que le taux exact d’absorption n’ait pas été quantifié. L’imagerie des cellules cancéreuses survivantes pendant 48 heures a montré qu’elles étaient capables d’entrer dans les hôtes et d’en sortir intactes. Les scientifiques prévoient de mener d’autres expériences pour voir si des résultats similaires se produisent lorsque d’autres protéines de réparation de l’ADN que Ku sont absentes.

« La déficience de Ku a créé un type de cellule spécifique capable d’attaquer les cellules voisines, de les habiter et d’en sortir », explique Nurten Saydam dans un courriel adressé à « The Scientist ».

Les chercheurs ont également étudié les cellules dites DAOY, qui, chez l’homme, peuvent conduire au médulloblastome, une tumeur cérébrale qui commence dans le cervelet. Ils rapportent que ces cellules ne possèdent pas les protéines Ku70 et Ku86 dans leur noyau, où ces dernières devraient se trouver normalement, mais qu’elles se trouvent dans le cytoplasme. Cette mauvaise localisation des protéines Ku dans les cellules DAOY a entraîné des membranes saillantes et des invasions cellulaires similaires à celles observées dans les cellules cancéreuses colorectales génétiquement modifiées.

« Les parasites entrent dans la cellule. Ils s’y cachent. Puis, lorsque tout est terminé, ils peuvent sortir et se développer beaucoup mieux », explique Nurten Saydam lors d’un entretien téléphonique. Son hypothèse est que les comportements parasitaires qu’elle a observés permettent aux cellules tumorales de s’adapter aux contraintes génétiques de leur microenvironnement et, finalement, de former des métastases.

Référence :

Frontiers in Cell and Developmental Biology (2021) : « Deficiency of Ku induces host cell exploitation in human cancer cells », O. Saydam, N. Saydam

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